Les deux figures ne pourraient être plus différentes.
Aurélie Lanctôt : jeune féministe, essayiste, chroniqueuse et étudiante en droit ayant déjà un cv de certainement plusieurs pages.
Bernard Adamus : grand chanteur de blues sale, poète du vrai monde et roi des nuits sans fin, père d’une jolie blonde.
Pourtant ces dernières semaines, les deux ont craqué, si on peut dire, et l’ont fait publiquement pour tous ceux qui s’en cachent. Vulnérables, mais forts de ça. Et inspirants.
J’ai trouvé la première tellement hot d’assumer ce cri du cœur sincère, moi qui la trouvais un peu trop parfaite à mon goût avant ça.
J’ai trouvé le deuxième encore plus touchant et beau, si c’était possible…
C’était le début de mes vacances et j’étais fatiguée comme si j’avais couru un marathon. Deux jours après avoir lu la chronique d’Aurélie Lanctôt intitulée Je ne sais pas quand je vais vivre et écouté une vidéo dans laquelle elle discute du sujet Sans filtre, je la croise dans la rue. L’air fatigué, elle aussi, mais quand même allumé.
Elle y met le doigt sur un bobo dont on ne parle pas souvent, à savoir que même lorsqu’on exerce un métier qui nous passionne, nous ne sommes pas à l’abri de l’épuisement et de la précarité, peut-être même au contraire.
Quand on en mange, c’est là que la frontière entre le travail et la sphère personnelle de notre vie s’estompe. C’est aussi là qu’on accepte les petits contrats, les heures sup non payées ou l’imprévisibilité de l’horaire.
Consciente de bénéficier de conditions de travail enviables, je me reconnaissais surtout dans la première mise en garde (celle sur l’appétit boulimique). Mais je pouvais très bien comprendre ce qui pousse tant d’enseignants, d’infirmières, d’artistes et d’intellectuels à accepter ces petits mais répétés affronts à leurs droits en tant que travailleurs.
Comme Aurélie l’explique, « Dire qu’il suffit de choisir un travail qui nous passionne pour que tout fasse sens, c’est comme dire qu’il suffit à une femme de tomber amoureuse d’un homme bien pour faire disparaître les inégalités entre les sexes. »
Comme quoi la passion et le sens d’un travail qu’on aime ne suffisent pas toujours, dans une société malade qui en demande toujours plus.
Comme quoi le droit du travail ne devrait pas être une question qu’on laisse seulement aux syndiqueux.
Et comme quoi, comme le disait si bien ma collègue Marie-Hélène, il faut préserver des moments où l’on se met en jachère pour que la créativité, les éclairs de génie, les élans de solidarité et l’envie d’améliorer notre monde puissent remonter d’eux-mêmes. Repousser, en quelque sorte…
J’ai aussi bien entendu eu une pensée (et plusieurs même) pour tous ces gens qui œuvrent dans le secteur pluriel, que nous avons la chance d’interviewer et de mettre en valeur dans nos campagnes, ne comptant pas les heures tant la mission de leur organisme est essentielle. Et elle l’est, je vous l’assure. Elles le sont toutes. Mais peut-être pas autant que le bien-être psychologique et physique des gens qui portent ces causes à bout de bras.
Car ce don de soi, qui est au cœur de notre domaine, il faut aussi bien le célébrer que s’en méfier. Donner, oui. Mais s’en garder un peu pour soi. Beaucoup même.
C’est ce que je souhaite à mon cher Bernard, qui a publié ceci pendant mes vacances et que je n’ai lu qu’il y a quelques jours (étant aussi en vacances de Facebook) :
« Je me suis réveillé presque 1 000 shows plus tard et une voix en moi me disait un message ben clair : « Bob y est temps que tu te fermes la trappe pour un temps pis vite à part de t’ça », vite avant de tout brûler, vite avant de perdre le principal, vite avant de plus en avoir le goût… […] Sachez tous que j’adore plus que tout ma « job » et vous me le rendez plus que bien depuis le début de l’aventure. Je ne veux pas perdre ce magnifique privilège que vous m’avez si généreusement accordé. »
Sur ce, je n’ai plus rien d’autre à ajouter.
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Pour lire la chronique complète d’Aurélie Lanctôt
Pour lire le message complet de Bernard Adamus
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Photo : Elizabeth Lies sur Unsplash
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